« Il est temps de changer cette tortilla» : Les travailleur·euses d'El Milagro (Chicago) débrayent et exigent un traitement équitable
Solidaires (CM)
Protestant contre des conditions abusives et un manque de personnel dans le contexte de la pandémie, les travailleur·eusesde l'emblématique tortillerie de Chicago ont quiité leur travail, avant d'être mis à la porte par la direction.
Jeudi, les travailleur·euses de la production alimentaire d'El Milagro - l'entreprise de tortillas la plus populaire de Chicago - ont organisé un débrayage temporaire, contre des années de violations du droit du travail et de conditions de travail abusives aggravées par la pandémie.
Après avoir quitté leur poste plus tôt, près de 100 travailleur·euses ont installé un piquet de grève devant la taqueria phare d'El Milagro et la tortilleria voisine dans le quartier de Little Village, dans le South Side de Chicago, promettant d'intensifier leurs protestations si la direction ne les rencontre pas pour discuter de leurs griefs d'ici le 29 septembre. Ils ont été rejoints par des chefs religieux locaux, des sympathisants de la communauté et le conseiller municipal socialiste Byron Sigcho-Lopez, du 25e arrondissement de Pilsen.
Laura Garza, directrice du centre de travailleur·euses Arise Chicago - qui aide les travailleur·euses non syndiqués d'El Milagro à s'organiser depuis plusieurs mois - a déclaré que 85 travailleur·euses ont contracté le Covid-19 au travail l'année dernière, et que cinq d'entre eux en sont mort·es. Les employé·es étant malades ou démissionnant, l'entreprise est en sous-effectif, ce qui a conduit à une pénurie de produits El Milagro dans les épiceries de la région de Chicago au début du mois, et l’on a vu des clients impatients faisant la queue devant les installations de l'entreprise pour mettre la main sur autant de tortillas qu'ils ou elles le pouvaient.
Outre des pancartes, les travailleur·euses portaient un burrito géant et des chips de tortilla en carton. Ils et elles ont entonné des chants pour changer le nom de l'entreprise de El Milagro à «El Maltrato», qui se traduit par «mauvais traitement».
«Vous avez entendu dire qu'il y a une pénurie de travailleur·euses à maintes reprises aux informations, mais le fait est qu'il n'y a pas une soi-disant pénurie de travailleurs, mais une pénurie de bons salaires, de bons avantages sociaux, de bonnes conditions de travail, et le fait d'être traité avec respect et dignité au travail», a déclaré Garza. Le centre des travailleur·euses a aussi récemment aidé à organiser les employés non syndiqués de la chaîne de restaurants Portillo's, qui ont fait grève pendant sept jours cet été.
Les travailleur·euses affirment que pour maintenir la production dans un contexte de pénurie de personnel, la direction les a illégalement contraints à travailler jusqu'à sept jours par semaine, tout en violant l'ordonnance de la ville sur les congés de maladie payés et en accélérant le fonctionnement des machines de production à des niveaux dangereux.
«Avec la vitesse extrême des machines, les gens ont des problèmes de santé, en particulier des maux de dos dus à la rapidité du travail», a déclaré Alfredo Martinez, ouvrier d'El Milagro, à In These Times. Martinez a ajouté que lui et ses collègues ont également souffert de problèmes de santé parce qu'ils ont dû travailler rapidement à des températures supérieures à 32 degrés, sans avoir droit à des pauses pour boire de l'eau.
«Ils font tourner ces machines pour produire plus de tortillas, mais nous ne sommes pas des machines», a déclaré Martin Salas, un employé d'El Milagro qui travaille dans l'entreprise depuis dix ans. «Je suis en train d'emballer 80 paquets en une minute. Si ça ne se fait pas, alors c'est ma faute».
Les travailleur·euses affirment également que la direction annonce de nouvelles offres d'emploi à 16 dollars de l'heure, soit plus que ce que gagnent les travailleur·euses qui travaillent dans l'entreprise depuis des années. Martinez, qui travaille à El Milagro depuis 13 ans, a déclaré que les employés chevronnés comme lui sont également censés former les nouveaux employés sans aucune compensation supplémentaire.
«Les nouveaux ne restent pas longtemps parce que c'est trop dur et il fait trop chaud», a déclaré Martinez. «Nous connaissons le travail, nous le faisons bien. C'est insultant quand vous travaillez ici depuis des années, que vous faites un bon travail et que de nouvelles personnes à peine formées gagnent plus que vous.»
Les travailleur·euses ont signalé de nombreux autres abus à El Milagro, notamment des cas de harcèlement sexuel et d'intimidation. Avec l'aide d'Arise Chicago, ils ont organisé un comité et exigent de la direction qu'elle mette en place une échelle salariale équitable basée sur l'ancienneté et l'expérience, qu'elle augmente les salaires à au moins 20 dollars de l'heure, qu'elle mette fin à tout harcèlement et qu'elle embauche davantage de personnel. Les travailleur·euses affirment que malgré l'envoi de plusieurs lettres à la direction, l'entreprise a jusqu'à présent refusé de les rencontrer pour discuter de leurs préoccupations.
Lorsque les employé·es qui ont débrayé de l'usine El Milagro de Little Village ont tenté de revenir pour terminer leur service après la manifestation - comme ils et elles avaient informé la direction – elles et ils ont été enfermés dehors. Arise Chicago affirme qu'il s'agit de représailles illégales de la part de l'entreprise. En apprenant que leurs collègues avaient été mis à la porte, cinq travailleur·euses du nettoyage arrivant pour l'équipe de nuit ont décidé de se joindre au débrayage.
Salas a déclaré que lorsque lui et d'autres travailleur·euses de la première équipe se sont rendus au travail vendredi matin, prêt·es à sortir en solidarité avec leurs collègues en lock-out, ils et elles ont été accueilli·es par un garde de sécurité armé. «C'est tout simplement une tactique que l'entreprise utilise pour nous intimider, et cela crée beaucoup de peur», a-t-il déclaré.
Lorsque les travailleur·eusesen lock-out se sont présentés aux ressources humaines vendredi matin pour reprendre le travail, ils ont été rejoints par Mike Rodriguez, conseiller municipal de la 22e circonscription, dont le district comprend l'usine El Milagro, Brandon Johnson, commissaire du Cook County Board, et Christel Williams- Hayes, secrétaire du Chicago Teachers Union [syndicat d'enseignant·es].
«Nous sommes avec vous», a dit Williams-Hayes aux travailleurs. «Ce que vous faites n'est pas mal. Soyez solidaires, défendez vos droits, n'ayez pas peur. »
La direction a promis de permettre aux employés en lock-out de reprendre le travail au début de leur quart de 14 heures vendredi, sans perte de salaire, selon un porte-parole d'Arise Chicago.
El Milagro n'a pas répondu à une demande de commentaire. L'entreprise a également fait l'objet de plaintes sur son site près d'Austin, au Texas, où elle a récemment été condamnée à une amende de 218 000 dollars par l'Administration de la santé et de la sécurité au travail pour des machines non sécurisées exposant les travailleur·euses à des risques d'amputation.
La lutte à El Milagro n'est pas sans rappeler les tentatives de syndicalisation des travailleur·euses immigrés de la Tortillería Del Rey, dans le quartier de Pilsen à Chicago, il y a 40 ans. Cette campagne avait été menée par le légendaire organisateur Rudy Lozano, qui, avant d'être assassiné en 1983, s'était rendu célèbre en aidant à construire l'unité des Noirs et des Latinos pour soutenir la candidature réussie d'Harold Washington à la mairie.
Jorge Mújica, organisateur des campagnes stratégiques d'Arise Chicago, a déclaré que les travailleur·euses exposent le côté «cupide» d'El Milagro. «En anglais, nous disons 'the other side of the coin'. En espagnol, nous disons 'el otro lado de la tortilla' [l'autre côté de la tortilla]», a-t-il expliqué. «Il est temps de retourner cette tortilla».
Jeudi, les travailleur·euses de la production alimentaire d'El Milagro - l'entreprise de tortillas la plus populaire de Chicago - ont organisé un débrayage temporaire, contre des années de violations du droit du travail et de conditions de travail abusives aggravées par la pandémie.
Après avoir quitté leur poste plus tôt, près de 100 travailleur·euses ont installé un piquet de grève devant la taqueria phare d'El Milagro et la tortilleria voisine dans le quartier de Little Village, dans le South Side de Chicago, promettant d'intensifier leurs protestations si la direction ne les rencontre pas pour discuter de leurs griefs d'ici le 29 septembre. Ils ont été rejoints par des chefs religieux locaux, des sympathisants de la communauté et le conseiller municipal socialiste Byron Sigcho-Lopez, du 25e arrondissement de Pilsen.
Laura Garza, directrice du centre de travailleur·euses Arise Chicago - qui aide les travailleur·euses non syndiqués d'El Milagro à s'organiser depuis plusieurs mois - a déclaré que 85 travailleur·euses ont contracté le Covid-19 au travail l'année dernière, et que cinq d'entre eux en sont mort·es. Les employé·es étant malades ou démissionnant, l'entreprise est en sous-effectif, ce qui a conduit à une pénurie de produits El Milagro dans les épiceries de la région de Chicago au début du mois, et l’on a vu des clients impatients faisant la queue devant les installations de l'entreprise pour mettre la main sur autant de tortillas qu'ils ou elles le pouvaient.
Outre des pancartes, les travailleur·euses portaient un burrito géant et des chips de tortilla en carton. Ils et elles ont entonné des chants pour changer le nom de l'entreprise de El Milagro à «El Maltrato», qui se traduit par «mauvais traitement».
«Vous avez entendu dire qu'il y a une pénurie de travailleur·euses à maintes reprises aux informations, mais le fait est qu'il n'y a pas une soi-disant pénurie de travailleurs, mais une pénurie de bons salaires, de bons avantages sociaux, de bonnes conditions de travail, et le fait d'être traité avec respect et dignité au travail», a déclaré Garza. Le centre des travailleur·euses a aussi récemment aidé à organiser les employés non syndiqués de la chaîne de restaurants Portillo's, qui ont fait grève pendant sept jours cet été.
Les travailleur·euses affirment que pour maintenir la production dans un contexte de pénurie de personnel, la direction les a illégalement contraints à travailler jusqu'à sept jours par semaine, tout en violant l'ordonnance de la ville sur les congés de maladie payés et en accélérant le fonctionnement des machines de production à des niveaux dangereux.
«Avec la vitesse extrême des machines, les gens ont des problèmes de santé, en particulier des maux de dos dus à la rapidité du travail», a déclaré Alfredo Martinez, ouvrier d'El Milagro, à In These Times. Martinez a ajouté que lui et ses collègues ont également souffert de problèmes de santé parce qu'ils ont dû travailler rapidement à des températures supérieures à 32 degrés, sans avoir droit à des pauses pour boire de l'eau.
«Ils font tourner ces machines pour produire plus de tortillas, mais nous ne sommes pas des machines», a déclaré Martin Salas, un employé d'El Milagro qui travaille dans l'entreprise depuis dix ans. «Je suis en train d'emballer 80 paquets en une minute. Si ça ne se fait pas, alors c'est ma faute».
Les travailleur·euses affirment également que la direction annonce de nouvelles offres d'emploi à 16 dollars de l'heure, soit plus que ce que gagnent les travailleur·euses qui travaillent dans l'entreprise depuis des années. Martinez, qui travaille à El Milagro depuis 13 ans, a déclaré que les employés chevronnés comme lui sont également censés former les nouveaux employés sans aucune compensation supplémentaire.
«Les nouveaux ne restent pas longtemps parce que c'est trop dur et il fait trop chaud», a déclaré Martinez. «Nous connaissons le travail, nous le faisons bien. C'est insultant quand vous travaillez ici depuis des années, que vous faites un bon travail et que de nouvelles personnes à peine formées gagnent plus que vous.»
Les travailleur·euses ont signalé de nombreux autres abus à El Milagro, notamment des cas de harcèlement sexuel et d'intimidation. Avec l'aide d'Arise Chicago, ils ont organisé un comité et exigent de la direction qu'elle mette en place une échelle salariale équitable basée sur l'ancienneté et l'expérience, qu'elle augmente les salaires à au moins 20 dollars de l'heure, qu'elle mette fin à tout harcèlement et qu'elle embauche davantage de personnel. Les travailleur·euses affirment que malgré l'envoi de plusieurs lettres à la direction, l'entreprise a jusqu'à présent refusé de les rencontrer pour discuter de leurs préoccupations.
Lorsque les employé·es qui ont débrayé de l'usine El Milagro de Little Village ont tenté de revenir pour terminer leur service après la manifestation - comme ils et elles avaient informé la direction – elles et ils ont été enfermés dehors. Arise Chicago affirme qu'il s'agit de représailles illégales de la part de l'entreprise. En apprenant que leurs collègues avaient été mis à la porte, cinq travailleur·euses du nettoyage arrivant pour l'équipe de nuit ont décidé de se joindre au débrayage.
Salas a déclaré que lorsque lui et d'autres travailleur·euses de la première équipe se sont rendus au travail vendredi matin, prêt·es à sortir en solidarité avec leurs collègues en lock-out, ils et elles ont été accueilli·es par un garde de sécurité armé. «C'est tout simplement une tactique que l'entreprise utilise pour nous intimider, et cela crée beaucoup de peur», a-t-il déclaré.
Lorsque les travailleur·eusesen lock-out se sont présentés aux ressources humaines vendredi matin pour reprendre le travail, ils ont été rejoints par Mike Rodriguez, conseiller municipal de la 22e circonscription, dont le district comprend l'usine El Milagro, Brandon Johnson, commissaire du Cook County Board, et Christel Williams- Hayes, secrétaire du Chicago Teachers Union [syndicat d'enseignant·es].
«Nous sommes avec vous», a dit Williams-Hayes aux travailleurs. «Ce que vous faites n'est pas mal. Soyez solidaires, défendez vos droits, n'ayez pas peur. »
La direction a promis de permettre aux employés en lock-out de reprendre le travail au début de leur quart de 14 heures vendredi, sans perte de salaire, selon un porte-parole d'Arise Chicago.
El Milagro n'a pas répondu à une demande de commentaire. L'entreprise a également fait l'objet de plaintes sur son site près d'Austin, au Texas, où elle a récemment été condamnée à une amende de 218 000 dollars par l'Administration de la santé et de la sécurité au travail pour des machines non sécurisées exposant les travailleur·euses à des risques d'amputation.
La lutte à El Milagro n'est pas sans rappeler les tentatives de syndicalisation des travailleur·euses immigrés de la Tortillería Del Rey, dans le quartier de Pilsen à Chicago, il y a 40 ans. Cette campagne avait été menée par le légendaire organisateur Rudy Lozano, qui, avant d'être assassiné en 1983, s'était rendu célèbre en aidant à construire l'unité des Noirs et des Latinos pour soutenir la candidature réussie d'Harold Washington à la mairie.
Jorge Mújica, organisateur des campagnes stratégiques d'Arise Chicago, a déclaré que les travailleur·euses exposent le côté «cupide» d'El Milagro. «En anglais, nous disons 'the other side of the coin'. En espagnol, nous disons 'el otro lado de la tortilla' [l'autre côté de la tortilla]», a-t-il expliqué. «Il est temps de retourner cette tortilla».